Le devoir de conseil « renforcé » du maître d’œuvre lors de la réception
En droit public, la réception des travaux met fin aux relations contractuelles entre le maître d’ouvrage et les constructeurs, pour ce qui concerne les obligations techniques (les obligations financières s’éteignant par l’intervention du décompte général définitif).
Pour les désordres qui ne relèveraient pas des garanties légales, notamment de la garantie décennale, la responsabilité du maître d’œuvre ne peut donc pas être recherchée sur un fondement contractuel, après la réception, au titre d’un manquement dans l’exécution de la mission technique qui lui a été confiée.
En revanche, sa responsabilité est susceptible d’être recherchée au titre de son obligation de conseil dans le cadre de sa mission d’assistance du maître d’ouvrage lors de la réception. C’est ce que rappelle le Conseil d’Etat aux termes de son arrêt du 22 décembre 2023 en indiquant que la responsabilité des maîtres d’œuvre pour manquement à leur devoir de conseil peut être engagée dès lors qu’ils se sont abstenus d’appeler l’attention du maître d’ouvrage sur des désordres affectant l’ouvrage et dont ils pouvaient avoir connaissance, en sorte que la personne publique soit mise à même de ne pas réceptionner l’ouvrage ou d’assortir la réception de réserves.
L’apport de cette décision tient en ce que le Conseil d’Etat ajoute que ce devoir de conseil implique que le maître d’œuvre signale au maître d’ouvrage toute non-conformité de l’ouvrage aux stipulations contractuelles, aux règles de l’art et aux normes qui lui sont applicables, afin que celui-ci puisse éventuellement ne pas prononcer la réception et décider des travaux nécessaires à la mise en conformité de l’ouvrage.
Au-delà des malfaçons, le devoir de conseil du maître d’œuvre est donc étendu à toutes les non-conformités, y compris aux normes applicables en matière par exemple d’aération ou d’accessibilité.
Conseil d’État, 7ème – 2ème chambres réunies, 22/12/2023, 472699